Lancement des « Ateliers Annie & Charles Corrin » pour faire vivre la transmission de l’histoire de la Shoah dans les mouvements de jeunesse.

Porté depuis plus de trente ans par le FSJU, le Prix Annie et Charles Corrin pour l’enseignement de l’histoire de la Shoah a pour vocation de récompenser un travail autour de la transmission de la mémoire de la Shoah, à travers des projets réalisés par des établissements scolaires ou des associations de jeunes. Repris depuis deux ans par l’Action Jeunesse, un des objectifs consistait à renouveler une partie du jury, présidé par Boris Cyrulnik, et faire vivre ce prix toute l’année, grâce à des ateliers utilisant la palette des méthodes actives de l’éducation informelle.

C’est ainsi que le 30 mars dernier se tenait, à l’Espace Rachi, le premier “Atelier Annie et Charles Corrin pour l’enseignement de l’histoire de la Shoah”, événement qui a réuni 30 cadres des mouvements de jeunesse afin d’échanger sur les dispositifs pédagogiques disponibles pour transmettre la Shoah de manière informelle auprès des enfants dont ils ont la charge dans leurs activités courantes ou en colo.

En novembre 2022, lors du séminaire Hineni proposé par l’Action Jeunesse et d’une table ronde dédiée au “Futur de la Mémoire”, organisée à l’Hôtel de Ville de Lyon, en présence de Pierre-Jérôme Biscarat, Frédérique Neau Dufour et Sylvie Altar, historiens et professeurs d’Histoire, ainsi que la représentante de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, les cadres de mouvement de jeunesse n’ont pas manqué pas de signaler que « la Shoah est un sujet très délicat, qui doit être abordé dans nos mouvements de jeunesse, mais pas n’importe comment. Et nous sommes, en vérité, ce malgré l’abondance des sources historiographiques et des instituts mémoriels, assez perdus » (Arié Elmaleh, ex responsable de Moadon).

Ces mots ont été pris très au sérieux par l’Action Jeunesse qui y a vu un cri d’alerte des éducateurs des principales associations de jeunesse, effectivement inquiètes quant à la disparition inéluctable des témoins, la permanence du révisionnisme et de l’antisémitisme, et des thèses complotistes de tous poils qui sévissent sur les réseaux sociaux.

« Après concertation avec les trois filles du couple Corrin, garantes du legs éducatif de leurs parents, nous avons décidé d’accompagner nos jeunes sur les sujets de Mémoire et Transmission, en leur procurant au long cours, et de façon fiable, les outils, méthodes, et sources qui leur permettent de diffuser aux plus jeunes une sensibilisation, à tout le moins, des stratégies éducatives adaptées à chaque âge. Grâce à notre activité et encore plus depuis que le département coordonne le Prix Corrin, nous sommes en contact avec beaucoup d’associations et de structures qui proposent des formations ou des échanges avec les jeunes. Il fallait que NOÉ puisse faire le lien entre ces deux mondes. L’objectif premier a une visée éducative, puis dans un second temps, nous espérons que ce contenu que les jeunes auront découvert leur donnera envie de s’emparer du sujet en présentant un projet pour le Prix Corrin au titre du secteur de l’éducation informelle », explique Débora Dahan, coordinatrice du Prix.

Le premier ‘’Atelier Annie et Charles Corrin pour l’enseignement de l’histoire de la Shoah” s’est donc tenu en présence de Galith Touati, directrice de l’association Yad Layeled : “L’enfant et la Shoah”, laquelle propose des expositions itinérantes dans les écoles élémentaires et les collèges autour de plusieurs modules en fonction de l’âge des enfants.

La soirée a débuté par un échange autour des activités que proposent les jeunes en mouvement de jeunesse sur la thématique, puis Galith Touati a présenté le module intitulé “Une histoire sans parole”, qui permet de suivre le parcours d’une famille juive en France pendant la Shoah, à partir de douze dessins de Hervé Duphot, d’un livret pédagogique et un livret documentaire. 

Cet atelier de photolangage, destiné aux classes de CM2, met en exergue le sauvetage des enfants juifs pendant la guerre : « Je ne pensais pas qu’il était possible d’aborder la Shoah en école élémentaire et effectivement, on ne parle pas des camps d’extermination, mais plutôt de la transmission de l’Histoire et des Justes parmi les Nations qui ont aidé au sauvetage de 69 000 enfants. C’est sur ce point que l’on insiste pour les plus petits. Cette mallette pédagogique me sera très utile ; je vais utiliser cette activité prochainement en colo », explique Paul, jeune militant de Yaniv qui prépare un voyage de mémoire en Pologne pour l’an prochain avec son organisation.


En seconde partie, Galith Touati a présenté une activité destinée aux adolescents et à l’atelier qu’elle présente en collège “Face à l’histoire”.

À la lumière de situations vécues par des enfants juifs cachés pendant la Seconde Guerre mondiale et qui témoignent dans cet atelier, les adolescents sont invités à débattre avec leurs professeurs de questions telles que : « Peut-on avoir une raison légitime de désobéir aux lois ? », « En quoi suis-je concerné(e) par ce qui arrive aux autres ?», …

Nina, animatrice de l’Hachomer Hatzaïr témoigne : « Nous commémorons Yom Hashoah chaque année au local de l’Hachomer, participons à la lecture des noms des déportés et à la cérémonie officielle à la Synagogue de la Victoire. La transmission est une brique essentielle de notre mouvement. Nous revenons justement d’un voyage en Pologne en avril. Cet « atelier Corrin » nous est vraiment utile, car il nous fait réaliser ce que font les autres mouvements et d’échanger nos pratiques, en vue de les adapter/adopter. »

Eliana, cadre pédagogique aux EEIF, en charge des questions de « mémoire » au Centre National du mouvement scout ajoute : « Notre génération a conscience qu’elle est à un moment charnière, puisque nous avons encore la possibilité d’échanger avec les derniers témoins et que nous devenons des “témoins de témoins”, comme disait Elie Buzyn (z’l) qui nous a quittés en mai 2022. Nous devons nous emparer de cette opportunité et cet accompagnement est très bénéfique pour nous »,

Pari gagné pour ce premier « atelier Annie et Charles Corrin pour l’enseignement de l’histoire de la Shoah », lancé dans une belle dynamique et qui verra naître une sortie par trimestre, à Paris et en région avec le concours des délégations régionales FSJU, sous différents formats : visites d’expositions temporaires au Mémorial de la Shoah, Camp des Milles, Struthof, … projection de films, conférences d’intervenants.

Un second rendez-vous est d’ores et déjà planifié le 21 mai prochain à l’Espace Rachi pour une rencontre exceptionnelle avec Ginette Kolinka, rescapée d’Auschwitz, qui viendra témoigner à la suite de son dernier livre Une vie Heureuse, paru chez Grasset en mars 2023.